D’après un article d’Aurélie Pasquelin, journaliste pour MySIH Magazine– mars 2025
1. Un projet stratégique pour moderniser l’accès aux données de santé
Depuis plusieurs années, le CHU de Toulouse s’engage dans une modernisation en profondeur de son système d’information hospitalier. Dans ce cadre, l’établissement a initié en 2019 un projet majeur en partenariat avec InterSystems, éditeur reconnu dans le domaine de l’interopérabilité, et la société Fyrstain, experte du standard HL7® FHIR®. L’objectif : faciliter l’accès aux données de santé tout en garantissant une sécurité optimale.
Ce projet répond à un double enjeu : d’une part, simplifier les échanges entre les différentes applications utilisées dans l’hôpital, et d’autre part, permettre à des applications tierces (recherche, coordination territoriale, registres…) d’accéder aux données de manière standardisée, encadrée et sécurisée. En ce sens, le CHU de Toulouse anticipe les besoins croissants des professionnels de santé en matière de fluidité d’accès aux données et de capacité à les croiser de manière fiable et traçable.
2. HL7 FHIR : une réponse moderne aux défis de l’interopérabilité
Le choix du standard HL7 FHIR (Fast Healthcare Interoperability Resources) n’est pas anodin. Conçu par HL7 International, ce standard repose sur les principes des technologies web modernes : API RESTful, formats d’échange JSON ou XML, modularité et compatibilité avec les environnements cloud. Il permet de structurer les données de santé sous forme de « ressources » (patients, observations, rendez-vous, prescriptions…) interrogeables à la demande via des services web.
Dans un contexte où les établissements de santé doivent gérer une multiplication des applications métiers, FHIR offre une alternative aux échanges lourds et rigides basés sur les messages HL7 V2 ou CDA. Il permet une interopérabilité en temps réel, facilite la mutualisation des données pour des usages variés (soins, pilotage, recherche, intelligence artificielle), et réduit significativement les besoins en double saisie. En choisissant FHIR, le CHU de Toulouse fait le pari d’une infrastructure plus agile, évolutive et orientée « services ».
3. Une gouvernance des données poussée à un niveau inédit
L’un des aspects les plus innovants du projet toulousain réside dans la manière dont sont gérés les droits d’accès aux données. Alors que FHIR prévoit trois niveaux standards de gestion d’accès (lecture, écriture, modification), le CHU de Toulouse a développé une approche en cinq niveaux de granularité, adaptée aux besoins spécifiques d’un grand établissement de santé.
Cette gouvernance avancée permet notamment de filtrer les données par cohortes de patients, de limiter les attributs visibles en fonction du profil du requérant, et de contrôler les accès en tenant compte du contexte d’utilisation. C’est une première mondiale pour un hôpital, qui répond à des enjeux cruciaux : garantir le respect du secret médical, sécuriser l’accès aux données sensibles, tout en ouvrant des possibilités d’exploitation maîtrisées pour la recherche ou la coordination des soins.
Ce modèle pourrait servir de référence à d’autres établissements en France ou en Europe, à l’heure où les questions d’éthique, de souveraineté et de confiance numérique sont au cœur des stratégies numériques hospitalières.
4. Une vision alignée avec les dynamiques nationales et européennes
Le projet du CHU de Toulouse s’inscrit pleinement dans les priorités du numérique en santé en France. Il anticipe et accompagne les évolutions portées par des initiatives comme Mon Espace Santé, l’Annuaire Santé, ou encore la future mise en œuvre de l’Espace Européen des Données de Santé (EHDS), qui nécessitera un langage commun et interopérable à l’échelle du continent.
Techniquement, le CHU a fait le choix de s’appuyer sur le serveur InterSystems IRIS for Health, certifié FHIR, et sur une infrastructure Kubernetes, gage de robustesse et de scalabilité. Le développement est réalisé en Python, un langage ouvert et largement adopté dans les projets data, ce qui facilite la réutilisation des composants dans d’autres contextes (régionaux ou nationaux).
En adoptant des standards internationaux, une architecture ouverte, et une logique de partage et de réplicabilité, le CHU de Toulouse se positionne comme un acteur moteur de la transformation numérique du secteur hospitalier français — et peut-être européen.
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